Lionel Messi au PSG, une pièce maîtresse dans le plan de jeu du Qatar

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La séquence du transfert de Lionel Messi du FC Barcelone au Paris Saint-Germain s’est achevée ce mercredi 11 août avec une journée consacrée à la présentation aux supporters et aux médias, au lendemain de la signature de son contrat avec le club de la capitale.

Selon Le Parisien, le salaire de l’Argentin s’élèvera à 41 millions d’euros nets par an (plus que ses nouveaux coéquipiers Neymar, environ 36 millions, et Kylian Mbappé, 18 millions), un montant auquel il faut ajouter les primes, ce qui représenterait un total de 120 millions d’euros sur deux ans. Le monde du football attend avec impatience de voir ce que le nouveau joueur le plus cher de la Ligue 1, qui a marqué 672 buts pour le FC Barcelone, peut apporter au championnat français.


Lionel Messi accueilli comme un roi à Paris (France 24, 11 août 2021).

Les propriétaires du PSG, quant à eux, regardent un peu plus loin, en se concentrant sur 2022. Depuis que Qatar Sports Investments (QSI) en a acquis une participation majoritaire en 2011, le club a déjà beaucoup dépensé pour dominer le football français et remporter des succès sur la scène européenne.

Objectif : le sacre européen

Le titre national est presque devenu une routine, à l’exception de quelques surprises comme la saison dernière, lorsque le club s’est classé deuxième derrière Lille. En revanche, le trophée de la Ligue des champions se révèle toujours insaisissable.

L’arrivée de Messi donne le sentiment que la saison à venir sera cruciale dans cette optique. En effet, elle intervient quelques semaines après le recrutement d’autres grands joueurs comme le gardien de but de l’Italie, Gianluigi Donnarumma, élu meilleur joueur de l’Euro 2020, ou encore le défenseur du Real Madrid Sergio Ramos. Tout autre résultat qu’un titre européen serait en conséquence considéré comme un échec.

Si le PSG y parvient, le symbolisme d’une telle victoire serait frappant, car cinq mois plus tard seulement, le Qatar accueillera la Coupe du monde de football 2022. Ce serait alors une année triomphale pour le petit État du Golfe et ses investissements dans le football, sur le terrain comme en dehors.

Depuis 1971, date à laquelle le Qatar a cessé d’être un protectorat britannique, la famille régnante du pays s’efforce de trouver la meilleure façon d’utiliser ses richesses naturelles. Confronté à la nécessité de diversifier son économie pour ne plus dépendre du gaz et du pétrole, le pays a lancé en 2008 sa « Vision nationale 2030 ».

L’objectif est de « transformer le Qatar en une société avancée capable de mettre en œuvre un développement durable ». Cette vision a donné naissance à une stratégie de développement dont le sport et le football sont des éléments importants.

L’organisation de la Coupe du monde, un tournoi de quatre semaines, vise ainsi à promouvoir le développement des infrastructures et le tourisme à long terme. L’acquisition du PSG fait également partie du plan : elle permet de gagner de l’argent et d’étendre l’influence qatarie dans le monde entier.

Cela signifie que, plutôt que d’être l’événement principal, l’arrivée de Lionel Messi apparaît finalement relativement accessoire par rapport aux larges ambitions du Qatar. Le gouvernement utilise en effet le football depuis des années comme un moyen d’atteindre des objectifs politiques.

Renforcer la « marque Qatar »

Le recrutement en 2017 par le PSG du Brésilien Neymar, ancien coéquipier de Messi à Barcelone, en est un exemple parfait. Le Qatar a utilisé ce contrat record de 222 millions d’euros pour montrer au monde (et à ses voisins immédiats, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis) sa puissance et son indépendance financières. Cette signature a également symbolisé la façon dont le gouvernement de Doha considère le football comme un élément de son arsenal de soft power, un moyen d’attirer l’attention du monde via la signature des meilleurs footballeurs de la planète.

L’arrivée de Lionel Messi au PSG peut être analysée de la même manière. Sa contribution attendue au succès du club permettra au Qatar de poursuivre sa projection de soft power, tout en renforçant le statut, l’image et la réputation de la « marque Qatar ».

Toutefois, la façon dont le club de la capitale respecte les règles du fair-play financier de l’UEFA, qui interdisent depuis 2010 à un club de dépenser plus qu’il ne gagne, fait débat. Le président de QSI et du PSG, Nasser Al-Khelaïfi, a assuré, lors d’une conférence de presse le mercredi 11 août, que le recrutement était conforme aux exigences de l’instance du football européen, mettant en avant les importants revenus que Lionel Messi allait générer.


Le président du PSG Nasser Al-Khelaïfi garantit que le recrutement de Lionel Messi respecte les règles du fair-play financier (Le Huffington Post, 11 août 2021).

Les mauvaises langues rappelleront que Nasser Al-Khelaïfi est par ailleurs président de l’Association européenne des clubs, une position qui lui permet de siéger au Conseil exécutif de l’UEFA. On pourra également rappeler qu’il a vivement soutenu l’UEFA face aux grands clubs européens qui envisageaient de faire sécession en créant une Super Ligue en avril dernier. L’échec de ce projet peut donc être vu comme une autre victoire qatarie en matière de soft power.

Désormais, le gouvernement de Doha veut que 2022 soit l’année du Qatar, sur le plan footballistique et au-delà. Lionel Messi a été recruté pour jouer un rôle dans ce plan de jeu hautement tactique.

Simon Chadwick, Global Professor of Eurasian Sport | Director of Eurasian Sport, EM Lyon

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

Image : Christian Bertrand / Shutterstock

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